'Je crois que la réponse est plutôt simple : il y a un manque de fonds.'

Doublement minoritaires : les franco-nunavois

By JIM BELL

À moins qu'il n'y ait une façon simple de les faire appliquer, les nouvelles lois sur les langues n'aideront pas les résidents du Nunavut à protéger et à promouvoir leurs langues, selon les francophones du Nunavut.

"Les lois doivent inclure des mécanismes qui en assurent la mise en oeuvre," a affirmé Daniel Cuerrier, directeur général de l'Association des francophones du Nunavut.

Cuerrier et l'avocat d'Iqaluit Paul Crowley ont comparu devant le comité Ajauqtiit de l'assemblée législative le 19 octobre dernier pour présenter aux députés leur opinion sur les projets de lois sur les langues du gouvernement du Nunavut : le projet de loi 6, qui créerait une nouvelle loi sur les langues officielles, et le projet de loi 7, qui créerait la loi sur la protection de la langue inuit.

Ils ont déclaré aux députés que les franco-nunavois sont une petite minorité très active profondément enracinée au Nunavut. Environ 1000 francophones vivent dans le territoire, pour la plupart à Iqaluit.

Et comme ils sont une "double minorité" – une minorité dans la communauté non-inuit, qui est elle-même une minorité dans un territoire inuit – ils disent très bien comprendre les craintes linguistiques des inuit, particulièrement à Iqaluit.

"À Iqaluit, il est possible de vivre en anglais si vous le voulez, sans connaître un mot de français ou d'inuktitut," de dire Crowley.

Ils ont aussi rappelé aux députés que 40 pour cent des élèves à l'école des Trois-Soleils d'Iqaluit sont des bénéficiaires inuit. Pour cette raison, ils voudraient que la loi sur la protection de la langue inuit garantisse l'éducation en langue inuit aux élèves de français langue première.

"Les langues ne devraient pas être enseignées dans un vide culturel… Et il y a une culture franco-nunavoise," selon Crowley.

Ils se sont toutefois dit satisfaits des droits de la langue française établis par la Loi sur les langues officielles actuelle, adoptée par le gouvernement des Territoires-du-Nord-Ouest en 1984.

Et ils sont aussi satisfaits que les projets de lois sur les langues ne portent pas atteinte à ces droits.

Ils affirment tout de même que les gouvernements territoriaux ne remplissent pas toutes les obligations qu'ils ont envers les francophones, tel qu'elles sont définies par la charte des droits fédérale et les lois sur les langues des territoires – principalement parce que les gouvernements refusent d'en défrayer les coûts.

"Je crois que la réponse est plutôt simple : il y a un manque de fonds," de dire Crowley.

Par exemple, la cour suprême des Territoires-du-Nord-Ouest a statué en 2005, à la suite d'une poursuite intentée en 1999, que le gouvernement des Territoires-du-Nord-Ouest enfreignait ses propres lois sur les langues de plusieurs façons. Le juge de cette cause a affirmé que ceci démontre "l'existence d'un problème sérieux et répandu."

La réaction du GTNO a été de suspendre la publication du journal des débats après que la cour lui a ordonné de le publier en français, et ensuite de porter la cause en appel.

Crowley a affirmé que les francophones du Nunavut avaient refusé de se joindre à cette poursuite, parce qu'en 1999, ils voulaient donner sa chance au nouveau gouvernement du Nunavut.

Il indique toutefois que la situation au Nunavut est en réalité pire qu'aux Territoires-du-Nord-Ouest – insinuant que le GN perdrait probablement un procès semblable.

De façon à prévenir de telles poursuites au Nunavut, les francophones affirment que la nouvelle loi sur les langues officielles devrait comprendre de meilleurs moyens permettant aux ayants droit de réclamer des compensations.

À cet effet, ils soutiennent que le commissaire aux langues devrait pouvoir déterminer les montants de dommages-intérêts à accorder, et ordonner au gouvernement de les verser dans un fonds qui servirait à la promotion des langues.

Pour cette raison, ils partagent l'avis d'autres groupes qui affirment que le rôle du commissaire aux langues devrait être renforcé plutôt que réduit.

Ils réclament aussi que le premier ministre soit nommé "ministre des langues", car celui-ci est le seul membre du cabinet qui ait le pouvoir de donner des directives à tous les ministères et agences du gouvernement.

Ils affirment aussi qu'ils n'ont pas eu un droit de parole suffisant lors des consultations qui ont précédé le dépôt des projets de loi 6 et 7 à l'assemblée plus tôt cette année.

"Le processus a débuté tard au printemps. À ce moment, le sort en était déjà jeté," de dire Crowley.

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