Nul n’est prophète en son pays!
Vous avez dû remarquer qu’il y a pas mal de journalistes en ville! Peut-être même avez vous été la cible de leurs questions. La presse écrite, la radio, ça passe un peu inaperçu. Quand vous en aperceve Z un, il est déjà trop tard, la question est déjà là : “Ça veut dire quoi pour vous le Nunavut?”
Les équipes de télévision, au contraire, attirent les regards de tous avec leurs grands micros habillés de peluche et leurs imposantes caméras qui collectionnent les images pour le petit écran. “Une petite question, s.v.p…..? Dites donc… pensez vous que la création du Nunavut va changer quelque chose dans votre vie?”
Pas mal plus reposant de la regarder, la télévision, bien assis dans le salon à manger des croustilles, que de la faire! C’est sans doute ce que découvre de ce temps là Saila Kipanek et Jimmy Markusie et leur bande de sculpteurs installés sur la plage d’Apex pour un programme de perfectionnement à la sculpture inuit.
Saila Kipanek est instructeur-sculpteur et ne s’attendait sans doute pas à une introduction intensive aux relations avec les médias en acceptant cette tâche : “Je suis pas si sûr qu’ils aident notre programme tous ces journalistes qui viennent nous filmer et nous interviewer, m’a-t-il expliquer, ils passent une heure ou deux ici, puis repartent avec leur matériel. Nous, on a besoin de support concret pour notre programme, on veut que ça continue!”
Pendant que Saila continue de réfléchir tout haut, l’équipe de télévision du bureau de Washington d’Associated Press interviewe longuement Ashoona Kilabuk qui participe aussi au programme. “Ces images vont être diffusées dans le monde entier, pas seulement aux Etats-Unis!” nous dira le journaliste après l’entrevue.
C’est la quatrième fois que ce programme de perfectionnement à la sculpture est offert à Iqaluit. À tout coup, il suscite de plus en plus d’intérêt soit chez des gens qui n’ont jamais touché à une roche de leur vie ou encore chez des sculpteurs qui veulent améliorer leur art. Plusieurs étudiants sont envoyés par le Centre correctionnel de Baffin.
Dans le passé, ce programme a été subventionné par le Ministère de l’Éducation de la Culture et de l’Emploi ou encore Kakivak, organisme affilié à QIA et voué à la formation et au développement économique. Cette présente session a été subventionnée à la toute dernière minute par Kakivak, qui y a toutefois imposé des restrictions budgétaires.
Pour arriver à joindre les deux bouts, Nunavut Training, une corporation privée qui organise ce programme, a été réduite à utiliser l’ancien bâtiment de la Compagnie de la Baie d’Hudson sur la plage d’Apex, loué à la compagnie du Nord-Ouest. Aucun des sculpteurs ne semble porter attention au fait que le bâtiment n’a pas d’électricité, pas de téléphone ni d’eau courante! Plus fiers que jamais, ils ont presque le sourire aux lèvres en gossant sur leur bloc de roche.
Les hommes et les femmes qui viennent sculpter arrivent vers neuf heure le matin pour ne repartir qu’en fin d’après-midi. Plusieurs arrivent à pied par le bord de l’eau puisqu’aucun budget de transport n’a été prévu. La plupart passent la journée à jeun. Aucun budget de nourriture n’a été prévu. À chaque jour de nouveau x candidats veulent se joindre à l’expérience!
Jimmy Markusie est administrateur du programme. Il prend note des présences et fait en sorte que tous les étudiants soient au poste le matin. “L’Associated Press, la Presse canadienne, Radio-Canada…Ça n’arrête pas! Ils défilent tous ici pour nous filmer et nous interviewer! Je comprends pourquoi! Ils veulent voir le Nunavut et c’est pas l’édifice du Parnaivik qui va les impressionner! Ils en ont plein chez eux des bureaux! C’est ce qu’on fait ici qu’ils veulent voir! Pour eux, c’est ici que ça se passe le Nunavut!” m’a-t-il confié en finissant tranquillement de griller une cigarette.
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